Le modèle de soins par paliers 2.0* (« stepped care ») repose sur une structure hiérarchisée de services de santé mentale, dont chaque palier offre une intensité de services différentes, allant de la prévention, à l’autogestion et à des interventions spécialisées. Ce type de modèle intègre également la thérapie « une séance à la fois », plutôt que la consultation prolongée. L’accent est mis sur la résolution de problèmes, les forces individuelles de la personne et son accompagnement dans le choix du service qui correspond le mieux à son besoin au moment présent.
* Il s’agit du modèle de soins par paliers 2.0 tel que développé par Dr. Peter Cornish. Dans la suite de cet article, l’expression « soins par paliers » sera utilisé et renvoie systématiquement aux soins par paliers 2.0. Pour en savoir plus sur ce modèle, cliquez ici.
L’implantation du modèle de soins par paliers a été initiée uniquement dans quelques établissements en enseignement supérieur au Québec, notamment au Cégep de Matane, au Cégep John Abbott et à l’Université McGill. L’équipe de la Station SME a rencontré Jérôme Forget, directeur des services aux étudiants du Cégep de Matane pour en savoir plus sur leur implantation du modèle.
Rapide survol de l’implantation du modèle
Pour M. Forget deux éléments sont principalement à l’origine de cette volonté de changement: la pandémie de COVID-19 et l’appropriation de la norme canadienne en santé mentale pour les étudiants postsecondaires. Ceux-ci ont respectivement mis en évidence les lacunes d’un modèle axé principalement sur la gestion de crise et les consultations individuelles ainsi que la possibilité d’envisager le soutien à la santé mentale différemment, c’est-à-dire à partir d’une approche écosystémique où tout le monde peut jouer un rôle.
Après avoir effectué des recherches de modèle de soins par paliers dans des établissements en enseignement supérieur québécois et canadiens, M. Forget a retenu les services d’une organisation dont la mission est d’accompagner des équipes de soins dans ce type de changement organisationnel. Sous cet accompagnement, le personnel et la population étudiante du Cégep de Matane ont d’abord été mobilisés à l’intérieur d’une large consultation visant à faire un état des lieux et des besoins spécifiques de la population étudiante. Celle-ci a permis de :
- Révéler les forces du milieu, comme l’importance des espaces naturels entourant le cégep, et les lacunes, dont la communication et l’information sur les services disponibles.
- Servir d’appui à la démarche de design collaboratif permettant de structurer les services dans les paliers de leur modèle (voir illustration ci-dessous)
- Jeter les bases d’un système de collecte de données sur l’utilisation des services afin de soutenir l’évaluation des retombées du modèle.

Parallèlement, une formation de 15 heures a été offerte aux intervenant.es des services aux étudiants pour adopter le modèle d’intervention de la thérapie « une séance à la fois ».
La thérapie « une séance à la fois » (ou Single-Session Therapy en anglais) est une approche de soins qui se concentre sur une seule séance comme intervention principale. Bien qu’elle n’exclue pas des suivis supplémentaires si nécessaire, elle est conçue pour maximiser l’efficacité et offrir une aide immédiate en une seule rencontre. Dans ce type de séance, l’intervenant.e se concentre sur une difficulté précise identifiée par la personne. L’objectif est de trouver avec elle des solutions pratiques et adaptées qui peuvent être mises en place rapidement, à partir des forces de la personne.
défis rencontrés
Un premier défi se situe au niveau des ressources alors que le Cégep de Matane est un établissement de petite taille, ce qui restreint les moyens humains et financiers disponibles pour déployer un projet de cette envergure. Le temps des intervenant.es est principalement consacré à des consultations urgentes, rendant difficile leur implication dans la consultation et la participation à des activités de co-conception à long terme. Il en va de même pour la population étudiante alors que le roulement élevé complique la continuité de leur implication et participation aux comités.
Le deuxième défi concerne le changement d’approche d’intervention alors que la thérapie « une séance à la fois » a bouleversé les habitudes des intervenant.es. Bien qu’ils et elles aient suivi une formation, l’aisance à adopter cette nouvelle approche demande du temps.
Un troisième défi réside dans la communication du changement en temps opportun à l’ensemble du personnel et auprès de la population étudiante.
eN CONCLUSION
Quelques mois après le début de l’implantation de ce modèle, on en retient qu’il convient de se donner le temps nécessaire pour favoriser son appropriation à la fois par le personnel et par la population étudiante. Pour continuer de cheminer en ce sens, M. Forget identifie les éléments suivants :
- Intégrer davantage la thérapie « une séance à la fois » dans les pratiques
- Assurer une transition fluide entre les différents paliers, notamment en facilitant la collaboration entre les services de l’établissement, mais aussi à l’externe et auprès de partenaire lorsque le niveau de soin le nécessite.
- Développer des outils de communication pour informer les étudiant.es des services qui s’offrent à eux selon ce nouveau modèle.
- Maintenir, voire augmenter, la participation étudiante pour soutenir ce changement et demeurer près des besoins et perspectives de la population étudiante.
- Suivre l’évolution de l’implantation du modèle et de ses retombées à partir d’un système de données.
Merci à M. Jérôme Forget du Cégep de Matane pour sa collaboration à cet article.
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