La dramathérapie, ou thérapie par l’art dramatique, fait partie des approches des arts créatifs utilisées en intervention psychosociale, aux côtés de la musicothérapie, le danse-thérapie et l’art-thérapie.  Cette approche peut donner la chance aux étudiant.es de raconter leur histoire et d’exprimer leurs émotions à travers différents médiums liés à l’art dramatique: la création de personnages, l’exploration de la métaphore, l’expression gestuelle, la création d’histoire, le théâtre d’objet ou de différentes formes d’écriture. Dans tous les cas, les expériences artistiques qui découlent d’intervention de la dramathérapie se veulent respectueuses du rythme et des limites de chacun.e, sans pression de performance esthétique.

En cohérence avec la mesure 4.1 du Plan d’action en santé mentale étudiante, l’équipe psychosociale du Collège Montmorency a souhaité diversifier son offre de service en soutien en santé mentale en y intégrant la dramathérapie. Cette approche complémentaire prend actuellement trois formes :

  1. Intervention individuelle
  2. Atelier de groupe
  3. Groupe de soutien à la transition interculturelle

L’équipe de la Station SME a rencontré Mélodie Bérubé, dramathérapeute au Collège Montmorency pour en savoir plus sur les interventions mises en place.

La dramathérapie lors d’une intervention individuelle 

La dramathérapie offerte aux étudiant.es dans le cadre d’un suivi individuel permet d’extérioriser et de projeter un enjeu émotionnel sous une forme artistique (un personnage, une histoire, un mouvement, un objet, une image, un monologue, etc.). Cette projection permet une distance émotionnelle avec les enjeux présentés par l’étudiant.e, l’amenant ainsi à explorer sa relation avec ceux-ci. Pour y arriver, l’étudiant.e et la dramathérapeute vont prendre le temps de questionner, explorer les perceptives, confronter, encourager, créer du sens, clarifier, faire preuve d’empathie ou encore normaliser l’œuvre extériorisée selon le besoin.

L’objectif consiste à susciter chez l’étudiant.e des prises de conscience, à initier une transformation par l’intermédiaire de l’art, puis à favoriser l’intégration de ce processus dans sa vie personnelle. Cela peut prendre la forme du plus petit pas possible, par exemple, de l’autocompassion, une stratégie de régulation émotionnelle, exprimer une limite, un pas vers une acceptation, etc.

Exemple d’exercice

Un.e étudiant.e crée un personnage, puis un monologue, représentant son anxiété. À travers cette personnification, l’étudiant.e explore l’idée qu’il ou elle n’est pas son anxiété, mais entretient plutôt une relation avec elle. Un dialogue peut alors s’installer entre ce personnage-anxiété et un « soi du futur », permettant d’aborder les peurs, les espoirs ou des ressources internes.

La dramathérapie dans un atelier de groupe

Les outils de la dramathérapie peuvent également enrichir les ateliers de groupe. Ces ateliers ponctuels combinent des moments d’éducation psychologique et des exercices ludiques issus de la dramathérapie. L’expression artistique devient alors un moyen pour les participant.es de relier théorie et vécu, d’explorer des notions comme le stress ou le discours intérieur et d’ouvrir un espace à l’introspection. L’avantage de la dramathérapie en contexte de groupe est qu’elle permet à la personne de limiter les informations partagées si elle le souhaite. En effet, comme la créativité se manifeste souvent sous forme de métaphore, le ou la participant.e peut utiliser les outils artistiques afin de créer du sens avec la théorie et s’offrir un moment d’introspection sans être dans l’obligation de partager sa signification avec l’ensemble du groupe. 

Exemple d’atelier de groupe

Deux ateliers visant l’apprivoisement du stress par des outils de la dramathérapie sont offerts à l’ensemble de la population étudiante au Collège Montmorency.

  • Le premier est une introduction au stress ainsi qu’à la tolérance au stress à partir du théâtre d’objet. L’étudiant.e est invité.e de créer un assemblage avec des objets symboliques qui représentent son stress actuel, puis une deuxième création qui représente un stress tolérable.
  • Le deuxième atelier s’intéresse à savoir comment le discours intérieur peut influencer le stress. Le médium artistique est alors la création de personnages où quelques types de pensée sont personnifiés. Des pensées liées à l’auto-critique, peuvent par exemple s’incarner dans la création d’un personnage avec des caractéristiques spécifiques, notamment sa posture, ses vêtements, ses mimiques, son ton de voix, etc.

Qu’est-ce que le théâtre d’objet?

Le théâtre d’objet est une forme d’expression artistique où des objets deviennent des personnages ou des éléments d’un récit. Loin des marionnettes ou décors classiques, cette forme d’art joue sur l’humour, la symbolisation, l’émotion et la surprise. Elle rend l’expression artistique accessible, stimule la créativité et offre une nouvelle façon de voir le monde.

La dramathérapie pour soutenir la transition interculturelle

Au Collège Montmorency, des groupes de dramathérapie sont offerts sur base volontaire aux étudiant.es qui participent au programme de francisation. Majoritairement en transition interculturelle, les participant.es sont invité.es à prendre part à 6 rencontres autour de thématiques clés: les transitions, les repères, l’espoir et le futur, l’autosoin, le sentiment de sécurité ainsi que la régulation émotionnelle. Les thèmes sont explorés notamment grâce à l’expression corporelle, le geste et le mouvement, le théâtre d’objet, l’utilisation d’image et de métaphores, etc. La dramathérapie devient ici un pont entre les cultures : les mots cèdent la place aux gestes, à l’image, au mouvement et à la symbolisation. Cela permet un accompagnement psychosocial riche, sans nécessiter la maîtrise parfaite de la langue française.

Exemple d’exercice

Lors d’une rencontre, les participant.e.s sont invité.e.s à créer une scène théâtrale représentant une fête qui serait célébrée dans 100 ans. Cette fête imaginaire serait organisée par leurs descendant.es en hommage à leur courage et à leur parcours migratoire. À travers cette création symbolique, les étudiant.e.s prennent souvent conscience de leurs forces, tout en se reconnectant à leurs espoirs.

Conclusion

En guise de conclusion, la parole est laissée à des étudiant.es qui ont bénéficié des outils de la dramathérapie ainsi qu’à des membres de l’équipe psychosociale du collège Montmorency qui découvrent et collaborent avec cette approche.

Personnellement, je trouve que la dramathérapie me permet de mieux connecter avec mes ressentis. Je suis moins dans l’intellectualisation, car mon cerveau est préoccupé avec une tâche. Donc cette manière me permet de truquer mon cerveau et de laisser tomber ma barrière d’intellectualisation. (Étudiant.e)

Pour moi, la dramathérapie m’a permis de m’exprimer d’une manière différente de la norme. J’ai réussi à mettre des mots sur mes émotions, ou sur des choses difficiles à exprimer, grâce à des objets, à l’art, etc. Alors que si cela avait été une méthode plus classique, j’aurais peut-être eu plus de mal à verbaliser mes émotions ou ma pensée. (Étudiant.e)

Les membres de l’équipe psychosociale du collège Montmorency quant à eux, rapportent que la dramathérapie :

«  … rejoint autrement les étudiant.es, qui ne consulteraient peut-être pas par les médiums traditionnels. Elle rejoint également une population étudiante ayant du mal à utiliser le langage verbal pour s’exprimer ou exprimer leurs émotions. » (Anick Lagacé, psychologue)

« …permet de briser l’isolement.  Le jeu permet d’aborder des sujets sensibles et émotifs. Cela permet également l’expression des émotions qui ne seraient pas socialement acceptées dans certains pays d’origine. »  (Marilou Forestier-Gauthier, travailleuse sociale et co-facilitatrice des groupes de dramathérapie offert aux étudiant.e.s de francisation )

« … est une superbe façon d’adresser, d’exprimer et de reconnaître les émotions sans être trop confronté.e par le poids des mots qui parfois peuvent  »retraumatiser ». Cela permet de suivre le rythme de l’étudiant.e et de lui donner une certaine forme de contrôle en pouvant choisir comment et jusqu’où il ou elle est prêt.e à aller dans l’intervention. » (Karen Métayer, travailleuse sociale )


Merci à Mélodie Bérubé, dramathérapeute au Collège Montmorency pour sa collaboration à cet article.

Références et ressources sur la dramathérapie pour aller plus loin

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