Le 19 mars 2024, Marie-Andrée Gill, une poète ilnue, a pris parole à l’occasion du mot d’ouverture de la première édition des Journées annuelles de transfert sur la santé mentale étudiante. Son allocution aborde l’anxiété, la panique et l’amour pour arriver à s’en sortir.
J’aimerais créer la distance qu’il faut entre moi et les choses.
Mais là je te parle en direct de mon cerveau qui tilte
Je perds le contrôle.
Des fois je peux pas y échapper, c’est liquide, ça coule, je peux pas rattraper ça avec mes mains
Il n’y a rien qui se passe et pourtant le délire tempête.
Ce qui monte, je le regarde monter
Pis ça ressemble tellement à réalité
Mon pouls clignote, toutes mes lumières de dash de char sont allumées,
le mot sortie écrit en rouge majuscules flashe sur toutes les portes du théatre de ma vie
On dirait que tout est fini
que je vais mourir live
J’ai ben beau me dire
que ca durera pas,
ça durera pas
tout mon corps me dit que c’est la vérité
Pis ça a tellement l’air d’être la vérité
Je me noie dans mon propre pouls
mes oiseaux se cognent aux vitres de tous les bords
pis j’arrive pas à licher mes blessures qui coulent pis coulent encore
j’essaie de respirer pis en même temps j’oublie de respirer
La machine de mon corps étouffe comme un ado qui chauffe à clutch
dans les côtes de Chicoutimi
Je vire de d’sour dans ma bouette
Je m’invente que je serai pas capable
Je m’invente que personne m’aime comme je suis
J’m’invente tout ce qui fait mal.
Je suis là, mais en même temps chu partie, je tombe dans les secondes
J’ tombe dans un sentiment d’explosion et d’éternité
Ça monte et ça me prend par les yeux
ça me prend par le ventre.
Le seul mot que je trouve pour me décrire c’est effondrement
La peur monte et je la regarde monter
doucement, doucement, je reste là
Dans la panique de cte mot là effondrement
Dans comme je suis en ce moment
Je suis pneu dégonflé, une débarque dans le vide
Un système d’alarme de char qui sonne pendant 20 minutes même si ya pas de voleur pentoute. Le fameux bouton panic accroché par inadvertance. Le maudit piton qui porte bien son nom.
Pis doucement, doucement,
Je reviens
Tranquillement, ben tranquillement je reviens
Je finis toujours par revenir.
C’est juste après que je me rends compte que
Dans le fond je suis juste le monde comme il respire en moi
Le monde parle de lui à travers moi
Ce que je vis, je le vis, on le vit toute
Pis c’est comme ça
Je regarde passer cette chose là
Qui est un mélange de condition humaine et d’époque
Je regarde passer la vague qui nous avale et
je me fais une cabane de couvertes
je nous fais une cabane de couvertes
un refuge pour la souffrance
Je me dis que c’est peut être ça aimer, c’est comprendre
Qui y a pas de frontières entre soi et le reste.
Que de prendre soin de ce qui est brisé en moi, en nous
C’est retourner à la seule chose qui nous tient : les relations
C’est pour ça que je te parle de tout ça.
Parce que je sais qu’à force
d’amour donné, reçu,
la peur se dépose
dans nos mains ouvertes
et brûle dans la lumière.
Marie-Andrée Gill, poète ilnue
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